Il s’agit ici d’un essai, une sorte d’esquisse, pour baliser le chemin qui conduirait l’humanité hors de ses problèmes climatiques. Les mesures proposées par la suite peuvent apparaître comme celles d’un monde à l’envers où les concepts actuels sont ni plus ni moins inversés. Comme si l’on regardait le monde la tête en bas. Tout est évidemment une question de point de vue. Quand on porte des lunettes munies de prismes qui inversent l’image, l’expérience montre qu’après quelques jours, la perception du monde devient normale. Les scientifiques actuels (tous mes respects pour les exceptions) regardent le monde avec des lunettes à prismes. Il y a des chances que nos petits-enfants jugeront notre vision actuelle du monde comme une sorte d’univers à l’envers. Ce qui est, par contre, encourageant est que les mesures proposées dans cet essai coûteront probablement bien moins cher que les sommes actuellement consacrées à la recherche de solutions qui, d’un point de vue scientifique, et cela, on peut déjà aisément le prouver, ne conduisent que dans une impasse.
L’aspect ironique de la démarche proposée pour la maîtrise des changements climatiques réside dans les «effets collatéraux» favorables comme la mise en place d’une production alimentaire durable, et l’élimination de tous les problèmes liés à l’eau (pollutions, pénurie, sécheresses, inondations, érosion, etc.) dans le monde. Sans parler de l’émergence très probable de nouvelles techniques de production «d’énergies vertes» avec des rendements qui feraient pâlir les thermodynamiciens les plus avisés.
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Lire aussi l’article sur le CO2 de l’atmosphère.
Première publication du texte de la présente page : 2014-10-07
Mise à jour : 2016-04-19
À grands maux les grands remèdes! L'augmentation de la teneur en CO2 de l'atmosphère apparaît de plus en plus comme une bombe à retardement susceptible d'aboutir à une véritable catastrophe planétaire. L'enjeu est la survie de la civilisation ou même tout simplement celle de l'homme, en tant qu'espèce. Les scénarios établis par des calculs, suivant différents modèles, aboutissent tous à des conclusions, pour le moins, alarmantes.
Les seuls remèdes actuellement envisagés sont la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) ou l’exploitation de puits de carbone où l’on stockerait le CO2 «excédentaire» de l’atmosphère. Or, grâce à la photosynthèse, le puits de carbone de loin le plus important à notre disposition est le monde végétal, qui fixe le carbone de l'atmosphère dans la biomasse (dénommé la séquestration du dioxyde de carbone).
La démarche actuelle, tout en laissant de côté une vision globale pourtant nécessaire, ne manque pas d’incohérence. «On fait tout» (?) pour réduire les émissions. Pendant ce temps, afin d’alimenter les besoins énergétiques insatiables, des moyens gigantesques sont mis en œuvre pour la recherche de nouveaux gisements de combustibles fossiles (Cf. entre autres : le pétrole et le gaz de schiste). De toute évidence, au niveau des décideurs économiques – et politiques par voie de conséquence – l’objectif prioritaire ne semble pas être la mise en place d’une économie durable, mais celle d’un monde où les profits le sont.
D’une part, les adeptes de l’énergie nucléaire ont beau jeu de clamer leur «non contribution aux changements climatiques». D’un autre côté, en matière de recherches énergétiques, les scientifiques les plus éminents pratiquent la ruée vers les énergies vertes : biogaz et biocarburants, granulés de bois (pellets), production d’énergie électrique par la combustion de la biomasse, sont autant de filières qui ont la préférence de tous. Afin de poursuivre ces activités, on entend souvent la justification suivante : «les énergies vertes sont renouvelables, leur production est neutre par rapport à l’effet de serre». Cette affirmation est en passe de devenir une vérité inébranlable, aboutissant à la formulation d’un dogme. Nous allons montrer ici que cette démarche aboutit aussi à une impasse.
Depuis au moins 25 ans je défends publiquement une démarche très pratique et «terre-à-terre» pour la maîtrise de tous les problèmes liés à l’eau, avec les effets favorables sur la production alimentaire mondiale. Jusqu’à présent, ce discours n’a rencontré qu’un mur d’incompréhension et même d’hostilité [1]. J’ai fini par découvrir l’origine de l’opposition : le nœud du problème n’est pas de nature scientifique, mais philosophique [2].
La vision dominante est anthropocentrique et, de toute évidence, c'est ce qui inspire actuellement toutes les recherches. C’est aussi la philosophie qui régit toutes les activités. Il m’a fallu des années pour découvrir que ma démarche scientifique s’inspirait d’une vision autre, qu'on pourrait qualifier de biocentrique.
La vision anthropocentrique, est centrée sur le confort immédiat et l'intérêt à court terme de l'homme. Au contraire, le biocentrisme est une vision à long terme où le centre des préoccupations est l'intérêt de la biosphère dont l'humanité fait aussi partie. Avec ses préoccupations centrées sur lui-même, l'homme s’est mis mentalement en-dehors de la biosphère. Cette vision postule implicitement que la biosphère est au service de l'homme. De nombreux problèmes observés et connus de tous prouvent que la vision anthropocentrique est nuisible à l'ensemble de la vie sur cette planète. Les problèmes liés à l'eau, à la production alimentaire et aux changements climatiques sont les conséquences directes et immédiates de cette vision. Inversement, on peut montrer que l'humanité peut sortir de ces problèmes en moins d'un demi-siècle, en prenant, le plus rapidement possible, un virage vers une vision biocentrique. Plus ce virage tardera à venir, plus douloureuse sera la transition…
D’un point de vue scientifique et technique, la démarche esquissée ici, sans remettre en cause le confort de l'homme, vise à restaurer la biosphère, actuellement fortement malmenée, et en grande partie déjà détruite. Vu sous cet angle, l’augmentation de la teneur en CO2 de l’atmosphère, au lieu d’être une sorte de catastrophe, une fatalité à gérer à coups de milliards, apparaît comme une chance, une opportunité à saisir pour créer des espaces de vie confortables pour l’humanité qui augmente en nombre. La clef n'est donc pas la réduction des émissions – bien que cela peut aussi aider – mais plutôt l'utilisation de ce carbone pour refroidir la planète, actuellement en surchauffe. A défaut d'un virage en ce sens, les changements climatiques apporteront leur lot de catastrophes qu'on qualifiera de « naturelles», alors qu’elles ne sont que les conséquences des décisions incorrectes du passé. Je répète, ces catastrophes prévisibles ne constituent nullement une fatalité, elles peuvent être évitées, pour autant qu’on veuille bien changer notre vision et engager un projet mondial de régénération de la biosphère.
L’idée de base de notre démarche est le fait que l’atmosphère terrestre et le sol sont l’œuvre de la biosphère. Les deux sont largement interdépendants. Lorsqu’on laisse agir la biosphère (donc sans intervention de l’homme), un équilibre s’établit entre le carbone du CO2 de l’atmosphère et le carbone organique en activité dans la biosphère. Cet équilibre est actuellement rompu, mais sans l'intervention de l'homme, les mécanismes naturels de régulation peuvent prendre plusieurs dizaines de millénaires. L'homme peut accélérer le mécanisme de régulation (et aussi la «dérégulation»), en agissant sur l'humus du sol. La base de toute vie sur les continents est la terre fertile, la partie superficielle du sol. L’or brun de la terre est l’humus qui abrite une faune très riche qui vit en symbiose avec le monde végétal. Sans ce monde, à long terme, il n’y a pas de vie animale, ni humaine possible.
L’humus des terres agricoles a été brûlé par l’agriculture intensifiée, celui des forêts humides et tempérées par le déboisement et les incendies. Les cultures dites «énergétiques « sont en train d’achever la destruction des sols. Sans humus, la terre, la base de toute vie sur les continents, «ne tient plus». Elle s’en va dans les océans par érosion. À l’échelle humaine, cette perte est irremplaçable. Les incendies des forêts, le déboisement, la disparition de l’humus des terres agricoles, sans parler de la suppression des zones humides des rivières, a rejeté et rejette encore des quantités énormes de carbone dans l’atmosphère. Comme effet collatéral, faute d’humus, l’eau des précipitations n’arrive plus dans les nappes phréatiques (ou peu). Elle ruisselle directement vers les rivières dont le débit devient aléatoire : étiage en périodes sèches et inondation en périodes humides. Le cycle de l’eau est gravement perturbé. À cela s’ajoutent le surpâturage et les pratiques agricoles traditionnelles inadaptées dans les pays en voie de développement. Tout cela contribue d’une manière directe aux changements climatiques.
Les problèmes environnementaux que nous connaissons actuellement (énergie, eau, agriculture) trouvent leur origine dans la méconnaissance des mécanismes de fonctionnement des grands cycles naturel. Sans une vision globale, le risque de faire des erreurs est grand. Malheureusement l’avis des «généralistes» des sciences ne pèse pas lourd devant celui des spécialistes de haut niveau qui ne connaissent bien que leur domaine. C’est souvent l’origine des décisions incorrectes touchant directement la biosphère.
La liaison entre la gestion des eaux résiduaires et les changements climatiques passe par l’agriculture et la production d’énergies vertes. Point de production alimentaire durable sans un traitement durable des eaux usées urbaines. Le premier pas incontournable passe donc par la suppression du système de «tout-à-l’égout «, obéissant aux mêmes principes que celui du «tout-à-la-poubelle». Une révision profonde de nos conceptions sur l'hygiène et sur le rôle des bactéries est également nécessaire. Sans cela, il ne sera pas possible d'entamer la démarche suggérée dans cet essai.
Les déjections humaines et animales ne sont pas des déchets, elles sont plus qu'une ressource : elles font partie intégrante du monde du vivant. Sans elles, le fonctionnement de la biosphère est gravement perturbé. Elles font partie des processus indispensables à la vie sur terre.
Les spécialistes en agriculture et en génie sanitaire n’ont pas encore découvert les liens intimes qui existent entre la gestion des eaux usées et l’agriculture. Cependant, les véritables responsables de cette situation sont à chercher dans le cercle de la médecine et tout particulièrement dans l’idéologie hygiéniste. Car l’hygiénisme est basée sur une démarche scientifique incomplète et incohérente. En simplifiant à l’extrême il s’agit de la méconnaissance de toutes les relations qui existent et peuvent exister entre les êtres microscopiques (bactéries, virus, champignons) et l’apparition de certaines maladies. L’effet le plus direct du système dogmatique établi par l’idéologie hygiéniste est le fait que plus de 3 milliards d’humains n’ont pas d’accès à une eau potable de bonne qualité. Les slogans du genre : «l’eau est un bien commun», «la gestion démocratique de l’eau», «le droit à l’eau potable de chaque être humain», «solidarité mondiale autour de l’eau», etc. ne constituent que des vœux pieux, sans aucun effet tangible. Sans adopter une vision biocentrique, ces problèmes s’aggraveront.
Mais la nuisance majeure de l’idéologie hygiéniste est le fait, qu’elle a «dans le collimateur» la matière fécale humaine comme le «le mal absolu». C’est la raison pour laquelle, dans les finalités de l’assainissement (déjà ce nom en dit long [3]), on cite, en toute première priorité «la protection de la santé humaine», tandis que la protection de l’environnement vient en tout dernier lieu, en passant par la notion de «institutionnellement approprié».
Les déjections humaines et animales ne sont pas des déchets, elles sont plus qu'une ressource : elles font partie intégrante du monde du vivant. Sans elles, le fonctionnement de la biosphère est gravement perturbé. Elles font partie des processus indispensables à la vie sur terre.
Donc la charge polluante des eaux-vannes (eaux issues des W-C et des urinoirs) n’est pas un déchet dangereux, mais une ressource dont la valorisation est incontournable. Les eaux usées ne deviennent «déchets» qu’au moment où les eaux-grises (eaux savonneuses) et les eaux-vannes sont mélangées (le «tout-à-l’égout»). C’est l’épuration qui en fait un déchet dangereux. Sans entrer dans les détails scientifiques, l’épuration détruit les structures moléculaires indispensables à la formation de l’humus pour le sol et les transforme en pollution. Elle prive les sols d’un apport de structures organiques [4] indispensables au maintien de la teneur en humus. En ce sens, l’épuration des eaux résiduaires urbaines est une nuisance environnementale majeure dont on refuse actuellement d’admettre les conséquences déjà visibles.
Les déjections de plus de 7 milliards d’humains (9 à 10 milliards prévus pour la fin du siècle) représentent une biomasse comparable à celle produite par les animaux d’élevage. Les deux ensemble, traitées avec une quantité très importante de matériaux végétaux (riches en cellulose) rendrait superflu l’usage des engrais chimiques dans la production alimentaire mondiale. Avec la suppression du «tout-à-l’égout» une infrastructure se met en place, surtout autour des grandes villes. Ce que nous avons dénommé «Centre de gestion intégrée de la biomasse» [7], où les matières organiques (déjections et matières végétales) font l’objet d’une imprégnation et d’un compostage, produiraient l’amendement organique agricole indispensable pour régénérer la biosphère.
C’est le chemin incontournable qui conduit à la régénération de la teneur en humus des terres agricoles et celle des autres sols aussi. Avec la suppression des engrais chimiques, les besoins en produit phytosanitaires régresseront également. Il n’est pas exagéré de dire, qu’en ce cas, l’agriculture mondiale devient biologique par la force des choses, sans le moindre règlement contraignant. Point ne sera nécessaire d’interdire l’usage des pesticides, puisque l’agriculture, devenue organique, n’en aura plus besoin.
Un gramme d’humus stabilisé dans le sol est capable d’y fixer jusqu’à 50 grammes d’eau, à la manière d’une éponge. Avec la régénération de la teneur en humus des terres, comme nous disions plus haut, l’eau des précipitations, au lieu de ruisseler vers les rivières, alimentera les nappes phréatiques, actuellement surexploitées. Les besoins en eau d’irrigation diminueront aussi. Le débit des rivières devenant plus régulier, la fréquence et la gravité des inondations diminuera aussi. Les effets des sécheresses s’atténueront.
La quantité énorme d’eaux-vannes collectées d’une manière sélective [5] et issues des villes, ainsi que de fumier des animaux, nécessitera toute la biomasse végétale disponible (que l’on brûle actuellement [6] sous prétexte de valorisation énergétique) pour utilisation dans les Centres de de gestion intégrée de la biomasse précités [7]. Les villes deviendront en quelque-sorte «le cordon ombilical» de la production alimentaire mondiale. Ce qui est tout à fait normal, puisque notre alimentation est un produit de la terre, c’est une évidence que nos déjections doivent y retourner, mais pas n’importe comment. C’est ainsi que les grands cycles naturels de carbone, de l’azote, du phosphore et aussi de l’eau seront enfin bouclés. Le nouveau génie sanitaire reconduit l’homme dans la biosphère. Pour les générations futures, l’épuration des eaux résiduaires urbaines apparaîtra comme une erreur du passé, un égarement…
La restauration de la teneur en humus des terres agricoles est un processus qui peut facilement prendre un demi-siècle, tout en mobilisant la totalité de la biomasse animale (humaine) et végétale disponible. Ce faisant, en plus du rétablissement du régime hydrique des écosystèmes, on assistera à des modifications locales du climat des régions sèches ou arides. Le climat fait du sol, mais l’inverse de cette affirmation est vrai aussi. Dans les régions sèches, grâce au pouvoir rétention d’eau des sols, avec l’extension de la végétation et l’évapotranspiration, les courants d’air ascendants deviendront moins fréquents et moins intenses. Ce qui modifiera dans le bon sens la pluviosité locale. A titre d’exemple, en mettant en place à l’échelle mondiale un vaste programme de gestion durable de la biomasse, vers le milieu de ce siècle, le pourtour de la méditerranée et le Moyen-Orient a des chances de devenir une vaste région verdoyante. Le flux migratoire sud-nord s’inversera, car dans ces régions et aussi au Sahel, il fera bon vivre.
La mobilisation globale de la biomasse disponible, dès maintenant (2014) et pendant des décennies stockera une quantité de carbone dans le sol et aussi dans le monde des végétaux, à la mesure des quantités de CO2 que l’usage des carburants fossiles a rejeté dans l’atmosphère. On créerait ainsi un puits de carbone qui, du moins dans sa phase de croissance, absorbera plus de CO2 de l’atmosphère que l’homme ne peut y rejeter. On assistera d’abord (après quelques années déjà) à un ralentissement de l’augmentation de la teneur en CO2, pour voir «le pic de CO2» probablement entre les années 2050 et 2080. Il serait trop long d’exposer les bases de cette prévision ici. Le pic de CO2 correspondra tout simplement à équilibrer les émissions avec l’absorption par la biosphère. [8]
Cette absorption sera évidemment plus grande que celle de la biosphère de l’ère préindustrielle. Pour arriver à ce résultat, il faudra pratiquement reboiser de très vastes régions actuellement sèches, semi-arides et arides. Heureusement ce phénomène est auto-catalytique. Il s’accélère en s’avançant, du moins jusqu’à un point d’équilibre.
Sans encourager la gabegie énergétique actuelle, grâce à cette quantité énorme de carbone rejetée dans l’atmosphère, l’humanité dispose d’une réserve inespérée de carbone pour augmenter la biomasse active dans la biosphère.
Il ne faut pas sous-estimer la «respiration» bien mesurable et mesurée de l’atmosphère. En un an, même la biosphère actuelle, passablement détruite et délabrée, échange annuellement plusieurs fois plus de CO2 avec l’atmosphère que l’homme y rejette par an. Avec l’extension de la biosphère, cette respiration annuelle devient de plus en plus intense, sans parler du fait qu’un écosystème en pleine croissance absorbe plus qu’il n’en rejette. L’équilibrage se fait au moment de l’arrêt de croissance. Seulement dans les 150 années à venir, l’homme suivra de près l’évolution de la teneur en CO2 de l’atmosphère et le flux de fixation par la biosphère. C’est probablement au début du 22ème siècle que l’on arrivera à cerner la teneur optimale en équilibre dynamique avec la biosphère. Compte tenu de la réserve de carbone dont nous disposons par la combustion du carbone fossile, on pourra calculer la superficie des déserts qu’il sera souhaitable de conquérir pour stabiliser la situation climatique.
Les scientifiques de l’avenir pourront alors calculer avec précision le point d’équilibre à ne pas dépasser afin de ne pas enclencher un refroidissement de la planète. La fixation des réserves de carbone rejeté par l’homme, dans la biomasse active, créera de vastes zones verdoyantes nouvelles pour le monde vivant et aussi pour les hommes du futur (au détriment des déserts). Avec la maîtrise des changements climatiques, on pourrait peut-être, alimenter les 10 milliards d’humains prévus pour la fin du siècle. Cependant, en adoptant la philosophie biocentrique, il restera encore un défi : la maîtrise des changements climatiques devra aller de pair avec celle de l’augmentation incontrôlée de la population.
En brûlant le charbon, le pétrole et le gaz naturel, l’homme n’a rien fait d’autre que libérer le carbone qui, il y a environ 200 millions d’années (à l’époque carbonifère) faisait partie intégrante de la biosphère. Suite à une série d’accidents géologiques, cette biomasse s’est retrouvée sous terre et a subi des transformations.
L’homme moderne a donc prélevé une partie de cette réserve souterraine de carbone à des fins énergétiques, mais au lieu d’aider la biosphère à retrouver un nouvel équilibre, il a continué à la détruire aussi. Ce faisant il n’a fait que renforcer le déséquilibre créé par la combustion. Il y a des chances pour que dans l’augmentation de la teneur en CO2 de l’atmosphère, la destruction de la biosphère – entamée par ailleurs depuis l’antiquité – aurait contribué aussi d’une manière significative. Ce que nous proposons actuellement, c’est tout simplement d’inverser la tendance actuelle – d’où «le monde à l’envers» - et profiter de cette réserve de CO2 atmosphérique pour renforcer la biosphère et surtout créer de nouveaux espaces de vie pour les espèces de toutes sortes, dont les espèces actuellement menacées de disparition, et pour l’humanité en croissance.
Nous pensons que c’est une erreur de mettre le déséquilibre actuel uniquement sur le dos de l’utilisation des combustibles fossiles. Il serait souhaitable d’entamer des recherches pour évaluer les proportions optimales entre la teneur en carbone de l’atmosphère et la quantité de carbone organique active dans la biosphère.
Contrairement aux idées reçues, la combustion de la biomasse à des fins énergétiques n’est pas une opération «neutre» au point de vue des changements climatiques. Dans une biosphère en équilibre avec l’atmosphère, on peut évidemment prélever une certaine quantité de biomasse végétale et animale à des fins énergétiques. La condition est de ne pas diminuer la quantité de biomasse active dans la biosphère. La gabegie énergétique actuelle ne peut envisager que des prélèvements gigantesques dans la biomasse, ce qui contribue à renforcer l’effet de serre provoqué par l’usage mégalomane des combustibles fossiles.
A l’état de délabrement de nos terres agricoles et de la destruction avancée de la biosphère, chaque kilogramme de biomasse animale (humaine) et végétale brûlée à des fins énergétiques constitue un facteur de déséquilibre. La valeur biologique (humus potentiel) de la biomasse ainsi détruite, est de loin supérieure à celle du très peu «d’énergie verte» produite. Faut-il rappeler que même en mobilisant toutes les terres agricoles pour la production d’énergie verte, cette activité, ne couvrira qu’une proportion très faible de nos besoins énergétiques actuels ! Comme filière énergétique, la combustion de la biomasse et celle de ses dérivés présente un très mauvais rendement.
En ce sens, la production des biocarburants et des biogaz comme le biométhane, ainsi que la combustion des déchets agricoles et des sous-produits forestiers pour produire de l’énergie électrique sont des activités suicidaires. Cela est d’autant plus vrai lorsque l’on détruit une ressource capitale pour la formation de l’humus (telle que les pellets de bois, matière pourtant idéale pour les centres d’imprégnation et de compostage).
Pour la production d’énergie verte, la solution de l’avenir passera par des voies microbiologiques [9]. Une des filières vraiment crédibles est la récupération de la chaleur de compostage pour chauffer des serres et des habitations. En effet, pendant le compostage de la paille imprégnée d’eaux-vannes la température peut monter jusqu’à 70°C et, moyennant une certaine intervention, peut se maintenir au-dessus de 50°C pendant plusieurs mois. Des expériences en cours en Hongrie sont encourageantes quant à la possibilité d’utiliser cette énergie thermique pour assurer un chauffage de base à des habitations.
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