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Assainissement Ecologique
Assainissement écologique et EAUTARCIE

Erreurs de la science du génie sanitaire

Les six principes de SAINECO

Eléments de l'assainissement écologique

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Dans ce chapitre, le lecteur peut se familiariser avec les techniques de SAINECO. Contrairement aux chapitres qui précèdent, il s'agit ici des considérations bien pratiques.

Pour écouter l'avis d'un ingénieur agricole sur les méfaits de l'agriculture intensive dite «chimique», cliquer ici

Il est instructif de lire un témoignage venant d'Andalousie (Espagne) sur les bienfaits de l'EAUTARCIE en région sèche.

Première publication du texte de la présente page sur www.eautarcie.com : novembre 2007

Adaptation du texte original et première publication de la présente page sur www.eautarcie.org : 2009-09-22

Mise à jour : 2014-10-07

Les divers éléments de SAINECO

Assainissement classique vs assainissement écologique

L'assainissement classique

Assainir = rendre sain. La philosophie de base de l'assainissement classique relève de l’anthropocentrisme et de l’idéologie de l'hygiénisme. Dans l'assainissement classique on se limite à assainir le milieu de l'habitation. On prend en charge la santé de l'utilisateur en s'efforçant de sauvegarder la population de tout contact avec des germes réputés pathogènes. C'est ce qui se trouve au centre des préoccupations. Pour cela, on aura recours à la désinfection chimique (chlore) et physique (irradiations).

On s'efforce aussi à rejeter une eau bien épurée dans le milieu récepteur. On favorisera donc l'épuration des eaux devant toute autre technique. Ce sont les installations collectives (distribution d'eau, épuration) qui sont nettement favorisées devant les techniques décentralisées. Sans l'exprimer explicitement, dans les faits, on donne la préférence aux techniques de réparation (comme l'épuration) en lieu et place des techniques de prévention (eau de pluie, toilettes sèches, chaudières à compost, etc.).

L'épuration est la technique par excellence de l'assainissement classique. Le rejet des eaux épurées se fait préférentiellement dans les cours d'eau. On minimise les impacts environnementaux de l'élimination des boues d'épuration. En fait, les techniciens n’aiment pas en parler. Pour évaluer la qualité d'une technologie classique, on met en avance la notion de performance épuratoire et on ne parle pas des performances environnementales. Dans les meilleurs des cas, on fera une étude d'impact.

L'épuration par les plantes fait aussi partie intégrante de l'assainissement classique. Elle répond exactement aux mêmes objectifs et exigences : épurer au mieux sans se préoccuper du reste.

Dans la gestion classique de l'eau, pour le public, on met de l'avant les économies d'eau réalisables au niveau du ménage. On insiste surtout sur les économies de bout de chandelle :

L'objectif, non rendu public, est de ne pas trop diminuer les recettes des sociétés distributrices, ni celles de la taxe pour l'épuration. Une réduction importante de la consommation perturberait le financement de la politique de l'eau. Pour un assainissement durable, toute la législation sur l'eau est à refaire : au lieu de faire payer les usages de l'eau, il faut taxer à la source les pollutions qu'on y rejette.

Les options qui réduisent d'une manière drastique la pression sur nos ressources hydriques, comme…

…ne sont malheureusement pas prises en compte, ou très peu.

L'assainissement écologique ou SAINECO

Il s'agit d'une nouvelle vision de l'assainissement, vision qui diffère sur de nombreux points de la vision classique, car elle intègre dans ses préoccupations toute la problématique de gestion durable de l'eau et aussi celle de la biomasse dans les villes, dans les habitations et dans l'agriculture. La gestion conjointe de l'eau et de la biomasse (la partie organique de la charge des eaux usées, déchets verts et la partie fermentescible des ordures urbaines, etc.) sont indispensables.

L'assainissement écologique (ou durable) élargit le champ d'application non seulement aux traitements des eaux usées, mais aussi à l'approvisionnement en eau des ménages, ainsi qu'aux impacts environnementaux en amont et en aval de l'acte d'épuration et/ou de traitement des eaux. Pour évaluer la qualité d'une technologie d'assainissement écologique, on définira la notion de performance environnementale. C'est à ce niveau que se trouve une des grandes différences entre les deux visions de l'assainissement.

Le premier principe de l'assainissement écologique est la collecte et le traitement sélectif des eaux-vannes (fécales) et des eaux grises (savonneuses). Pour le traitement des eaux-vannes on utilisera des déchets cellulosiques d'origine végétale pour en faire du compost. En zones rurales et péri-urbaines l'usager a le choix entre une toilette sèche et une fosse à vidanger, réservée uniquement aux eaux-vannes. Les eaux grises sont infiltrées dans le sol du jardin. En ville, les eaux grises sont collectées avec les égouts actuels, tandis que pour les eaux issues des WC à chasse économique se déversent dans un réseau d'égouts séparé. Celui-ci conduira ces eaux dans un centre d'imprégnation et de compostage.

On sera également attentif à l'influence des installations d'assainissement sur le régime hydrique de terroir.

Un des fondements de l'assainissement écologique vise à insérer les activités domestiques dans les grands cycles naturels. L'épuration classique constitue une rupture des cycles de l'azote, du carbone du phosphore et aussi de l'eau. Elle soustrait les activités domestiques de la biosphère, tout en générant de la pollution par les nitrates, phosphates, détergents et de résidus de médicament. En contrepartie, le respect de ces cycles par un assainissement écologique a un impact sur les changements climatiques, mais aussi sur la gestion de l'eau dans le monde et sur le fonctionnement des écosystèmes.

Régime hydrique

Le régime hydrique est la manière dont l'eau des précipitations se répartit sur un terroir donné entre ruissellement, infiltration dans le sol et évaporation. En ce sens, le régime hydrique fait partie intégrante du cycle de l'eau.

Le régime hydrique en assainissement classique

L'assainissement classique s'intéresse surtout à l'eau qui passe à travers les habitations pour les usages domestiques. Suivant cette vision on prélèvera dans les réserves d'eau (eaux souterraines, eaux de surface), celle destinée à la distribution. Après usage, cette eau est collectée et canalisée vers les stations d'épuration qui la déverseront épurée dans le milieu récepteur (rivières dans l'écrasante majorité des cas).

Les surfaces rendues imperméables favorisent le ruissellement au détriment de l'alimentation des nappes phréatiques (réserves d'eau souterraines). En assainissement classique l'eau de pluie provenant de toits des habitations doit être canalisée vers un système de collecte. Dans la pratique, cette eau rejoint les eaux usées dans les égouts. De ce fait, les précipitations diluent les eaux à épurer et perturbent le fonctionnement des stations d'épuration. Le temps de séjour des eaux en station d'épuration n'étant que de quelques heures, une grosse averse est susceptible de purger toute l'installation et rejeter la presque totalité de la charge polluante en traitement dans la rivière. La dilution des eaux usées par la pluie diminue donc l'efficacité de l'épuration.

Pour remédier à cette situation, on prévoit dans les stations d'épuration des circuits de dérivation pour canaliser l'eau des averses directement vers la rivière (avec la charge polluante non épurée qui se trouvait dans les égouts au moment de l'averse).

Une autre solution consiste à dédoubler les canalisations (égouts séparatifs). Les eaux usées et les eaux de ruissellement sont collectées dans deux systèmes d'égouts différents. Les premières entrent en station d'épuration les secondes aboutissent dans un bassin d'orage, avant leur rejet en rivière.

Les techniciens en génie sanitaire classique sont réticents, voire hostiles à l'utilisation domestique étendue de l'eau de pluie. La nouvelle loi en France qui réglemente les usages de l'eau de pluie en est le reflet fidèle.

En assainissement classique, l'eau de pluie apparaît comme une sorte de calamité qu'on doit canaliser vers la rivière le plus vite possible. Afin de limiter, autant que faire se peut son usage domestique (concurrence «déloyale» de la distribution centralisée, source de profits et de recettes fiscales), on recommandera le placement des citernes de trop petite capacité. On fera également peur à la population en agitant le spectre des bactéries pathogènes.

Résultat : la presque totalité de l'eau de précipitations qui tombent sur les toits est rapidement canalisée vers le cours d'eau le plus proche.

L'eau qui rejoint ainsi la rivière au départ des égouts séparatifs ou non, représente pour une ville le débit d'une rivière moyenne. Ce débit, s'ajoute à celui du cours d'eau récepteur. En cas de crue, il augmente le risque des inondations.

Le régime hydrique en assainissement écologique

L'assainissement écologique se soucie également de l'état de nos ressources en eau :

Approvisionnement en eau dans le système SAINECO

L'eau utilisée par le ménage provient exclusivement (ou en partie) de l'eau qui tombe sur le toit. Après traitement approprié et filtration, elle sert en priorité pour la boisson et l'alimentation, et s'il en reste, aux autres usages domestiques.

Afin de réduire les risques sanitaires et le prix de l'eau, une autre option consiste à distribuer de l'eau non potable, mais de « qualité inoffensive » à la population. Cette eau sert dans le ménage à tous les usages non-alimentaires (hygiène personnelle, lessive, vaisselle, etc.). Les quelques 5 litres d'eau rigoureusement potable, dont une personne a besoin par jour, elle sera produite dans chaque ménage à l'aide d'un système bon marché à osmose inverse. Cette eau sera réservée à la boisson, à la cuisson des aliments, éventuellement pour se laver les dents et pour la dernière eau de rinçage des salades et des légumes consommés.

La gestion des eaux grises et des eaux-vannes

En zones rurales et péri-urbaines, lorsqu'on utilise une bonne toilette sèche, les besoins en eau sont réduits de 25 à 35 % et les eaux usées ne contiennent que des eaux grises (savonneuses, sans eaux fécales). Après passage par une fosse à eaux grises, les eaux sont infiltrées ou dispersées dans le sol. En été, on peut aussi les valoriser pour l'irrigation des plantes du jardin, sans le moindre traitement préalable et sans nuisances environnementales.

Ceux qui tiennent à conserver leur WC, installeront une fosse à vidanger uniquement pour eaux-vannes. Les matières de vidanges seront acheminées – comme les eaux-vannes des villes – vers les centres d'imprégnation et du compostage.

Grâce à ces mesures, les matières organiques contenues dans les déjections seront compostées et transformées en amendement agricole sans azote lessivable. Donc, pas de pollution par les nitrates, ni par les phosphates, ni par les détergents.

Au point de vue de régime hydrique, une maison écologique ne pèse pas (ou très peu) sur nos réserves hydriques et elle ne pollue plus les eaux. En somme, comme si elle n'y était tout simplement pas.

Pour autant que son toit soit suffisamment grand, une telle maison n'a souvent pas besoin d'être raccordée au réseau de distribution d'eau. Les égouts (non étanches, donc peu onéreux) qui passent devant la maison ne draineront que les eaux de la voirie vers une zone humide naturelle. On n'a plus besoin de station d'épuration. En raison de la simplification des infrastructures, l'assainissement écologique a un coût inférieur à celui de l'assainissement classique, pour un degré de protection de l'environnement largement supérieur.

Techniques de réparation vs techniques de prévention

Contrairement à ce qui se passe dans l'assainissement classique, en assainissement écologique on donnera la priorité aux techniques de prévention de la pollution et des nuisances à la source, devant les technologies de réparation. A titre d'exemple, l'épuration est une technique de réparation, tandis que l'usage des toilettes sèches et le traitement sélectif des eaux constituent une technique de prévention de la pollution. L'utilisation intégrale de l'eau de pluie, naturellement douce permet la diminution de l'usage des détergents. Il s'agit aussi d'une technique de réduction de la pollution à la source. Boire l'eau de pluie filtrée réduit le rejet des flacons de plastiques (prévention de la pollution) et constitue un facteur non négligeable de sauvegarde de la santé (prévention des maladies).

En assainissement classique on épure tout. Il en résulte un drainage rapide des masses importantes d'eau par le réseau d'égouts vers les rivières. Avec la distribution centralisée, cette masse est prélevée dans les réserves hydriques et rejetée, après usage et épuration, dans les cours d'eau. En assainissement écologique (ou SAINECO) on remplacera une partie importante de l'eau prélevée dans les ressources par de l'eau de pluie et, après usage, au lieu de la rejeter dans les égouts, on s'efforcera de l'infiltrer (avec ou sans traitement, selon le cas) dans le sol.

L'ensemble des citernes correctement dimensionnées d'une ville (150 litres du volume de stockage par m² de toit) constitue un bassin d'orage d'une très grande efficacité.
Remarque : les amateurs de toit végétal justifient le placement de celui-ci, entre autres par la réduction de ruissellement vers l'égout. Or, précisément, c'est aux moments critiques des averses intenses et des périodes pluvieuses prolongées que le toit végétal ne retient plus l'eau des précipitations. Il ne faut pas perdre de vue non plus, que le toit végétal rend impossible la récupération de l'eau de pluie pour usage ménager.

Performance épuratoire vs performance environnementale

La performance épuratoire

La performance épuratoire est une grandeur physique sans unité, caractérisant le degré d'élimination de la charge polluante d'une eau usée par un système d'épuration. C'est le rapport entre la charge polluante Xe qui entre dans l'installation et celle qui en sort Xs avec les eaux épurées, exprimé en pourcentage.

P = performance épuratoire

Xs = charge polluante qui sort de l'installation

Xe = charge polluante qui entre dans l'installation

Une installation qui fonctionne mal, aura une performance épuratoire zéro, car la charge polluante qui sort sera identique à celle qui entre : Xs = Xe, d'où P = 0.

Une installation fonctionnant parfaitement aura une performance épuratoire de 100 %. Dans ce cas, Xs = 0, la totalité de la charge polluante est éliminée de l'eau, et P = 100.

N.B. La charge polluante X est un paramètre analytique, comme la DCO, la DBO5, la teneur en azote, en phosphore, etc.

La performance environnementale

La performance environnementale comprend un ensemble de facteurs caractérisant les impacts environnementaux d'une activité en général ou d'un système d'assainissement en particulier.

En assainissement écologique, la performance épuratoire n'est utilisée que lors du traitement sélectif des eaux grises issues des villes et uniquement au cas où ces eaux doivent être déversées dans une rivière. Dans tous les autres cas, les performances épuratoires sont dépourvues de sens, puisque dans le système SAINECO, on évite l'épuration.

Tant que l'assainissement écologique devra «partager le terrain» avec l'assainissement classique, pour évaluer ce dernier, il est nécessaire d'avoir recours à l'estimation de la performance environnementale. Ce sera un outil d'estimation provisoire. Les systèmes de traitement des eaux usées qui ne remplissent pas les cinq premiers principes de SAINECO seront progressivement éliminés. Donc pour évaluer les performances environnementales des anciens systèmes, on tiendra compte des facteurs suivants :

Le dernier facteur est le plus important. Certains de ces facteurs, mais pas tous, sont pris en compte dans les études d'impacts qui précèdent actuellement la mise ne place d'une station d'épuration publique.

Pour évaluer les performances environnementales des différents types de toilettes, on tiendra compte aussi d'une autre série de facteurs :

Eaux usées domestiques

Eaux-vannes et eaux grises

Actuellement, les eaux usées issues des habitations sont le mélange des eaux grises et des eaux-vannes. Suivant la vision classique, ces eaux doivent être mélangées et traitées ensemble. Dans le système SAINECO, on supprime le «tout-à-l'égout» : les deux types d'eau sont traités d'une manière sélective.

La composition qualitative des eaux usées domestiques

Eaux vannes Eaux grises
Eaux issues des WC et des urinoirs Eaux de lessive, vaisselle, bain, nettoyage

Matières organiques azotées et phosphorées.
Environ 98% de l'azote, 90% de phosphore des eaux usées se trouve dans les eaux-vannes, surtout sous forme organique.
Azote organique: environ 5 kg par an par personne.

Matières organiques sans azote, mais contenant du soufre et du phosphore.
Substances tensioactives: savons, détergents. Peu d’azote (provenant des vaisselles et de l’eau de distribution)

Phosphore organique d'origine métabolique, environ 1 kg par an par personne. Phosphore minérale des lessives sous forme de phosphates minérales, pour autant qu'on utilise les lessives phosphatées.
Très grand nombre de bactéries de contamination fécale : env. 99% de bactéries dans les eaux usées Peu de bactéries de contamination fécale (par rapport aux eaux-vannes).
Micropolluants: résidus de médicaments, antibiotiques, molécules œstrogènes, produits biocides de l'entretien des WC

Micropolluants: additifs aux produits de lessive, de vaisselle et d'entretien.

Assouplissants, produits de blanchiment optique, enzymes, etc.
Toujours froides Chaudes ou tièdes (important pour le traitement sélectif)
Moins de la moitié de la charge polluante globale des eaux usées domestiques, exprimée en DCO. Plus de la moitié de la charge polluante globale des eaux usées domestiques, exprimée en DCO.

Produits de l'épuration classique:
L'azote et le phosphore organiques sont oxydés en nitrates et en phosphates.

Ceux-ci se retrouvent dans les boues d'épuration et dans les eaux épurées.

Produits de l'épuration classique:

Eau, dioxyde de carbone, sulfates, phosphates.
La matière organique de nos déjections fait partie intégrante de la biosphère. Dans l'optique de la gestion durable, elle doit être recyclée dans la formation de l'humus du sol. Les eaux-vannes ne doivent en aucun cas être « épurées » mais valorisées! Les macromolécules de la charge polluante des eaux grises ne constituent une menace pour les cours d'eau qu'en cas de déversement après épuration. Lors de l'infiltration correcte dans le sol, l'impact environnemental est probablement nul.

Techniques de déversement des eaux épurées

Les techniques de déversement des eaux épurées ont souvent un impact plus important sur le milieu récepteur que la technique d'épuration ou de traitement en amont. En assainissement écologique on évite, autant que possible, le déversement des eaux épurées en eau de surface.

Même en cas d'une épuration performante, la charge polluante résiduaire constitue, à des degrés divers, une menace pour la vie aquatique. La situation est complètement différente en cas d'infiltration dans le sol. Seule l'infiltration des eaux vannes est susceptible de polluer les réserves d'eaux souterraines.

Traitement des eaux-vannes

Épuration sélective des eaux-vannes

En assainissement écologique, l'épuration sélective des eaux-vannes n'a aucun sens. Elle doit absolument être évitée. La bio-oxydation de la matière organique azotée constitue une dégradation, une destruction de la matière organique, de l'humus potentiel. Les eaux vannes – de préférence à l'état concentré ou pure – ne doivent en aucun cas être « épurées », mais valorisées. Elles doivent être traitées en tant que déchet solide et surtout conjointement avec nos autres déchets organiques cellulosiques. En ce sens, le principe même de l'épuration classique est incompatible avec le concept de développement durable.

Infiltration des eaux-vannes dans le sol

Dans le système SAINECO, on n'épure pas et on n'infiltre pas les eaux-vannes dans le sol. Pour être complet, nous devons dire quelques mots sur l'infiltration de ces eaux dans le sol. A la sortie du WC, leur charge polluante est constituée de macromolécules azotées organiques, et de l'urée (ou carbamide, composé organique azoté). En raison de leur moment dipolaire électrique, ces molécules ont une grande affinité vis-à-vis des particules du sol. Fixées dans le sol, la flore bactérienne naturelle toujours présente les décompose, en libérant progressivement l'azote sous forme nitrique et parfois ammoniacale. Le processus étant relativement lent, les nitrates ainsi formés ont une chance d'être assimilés par les plantes. C'est à ce niveau que se trouve une règle fondamentale à respecter :

Cette façon de procéder a l'avantage par rapport à l'épuration classique de polluer moins. Il n'en est pas moins vrai, que tout en étant simple et bon marché, le déversement et l'infiltration des eaux-vannes en zone humide est une destruction de la matière organique précieuse des déjections.

L'épuration individuelle classique, par la bio-oxydation accélère la formation des nitrates. En cas d'infiltration des eaux épurées, les plantes n'ont souvent pas le temps d'assimiler les nitrates qui, de ce fait rejoignent les eaux souterraines. Dans ce cas – et c'est ce qui se passe avec les installations imposées par la législation – mieux un système d'épuration classique fonctionne, plus il pollue l'environnement. Ainsi, voici une autre règle fondamentale à respecter :

En milieu rural, la solution traditionnelle consistait à déverser les eaux-vannes non traitées dans une fosse ouverte ou une zone humide garnie de plantes et sans écoulement. Cette solution élémentaire (et sans dépenses) protégeait mieux l'environnement que les meilleures micro-stations d'épuration électromécaniques très chères, et imposées actuellement par la loi. Par contre, le déversement des eaux-vannes, même bien épurées, dans un cours d'eau constitue une menace d'asphyxie de la rivière par eutrophisation, sans parler des autres nuisances.

L'infiltration des eaux-vannes sans traitement dans le sol ne constitue au mieux qu'un moindre mal par rapport à l'épuration classique fort onéreuse, polluante et énergivore. L'infiltration des eaux-vannes même après épuration, ne fait pas partie du concept d'assainissement écologique.

Épuration par les plantes et traitement des eaux grises

Quand on regarde les objectifs et les critères d'évaluation des systèmes d'épuration par les plantes, on découvre que dans les faits, il s'agit d'une technique d'assainissement classique.

L'usage de cette technique ne peut être justifié que par le maintien du système du « tout-à-l'égout ». Dès le moment où les eaux vannes ne sont pas produites, car on utilise une bonne toilette sèche, ou elles sont acheminées vers un centre d'imprégnation et du compostage, l'épuration par les plantes est complètement inutile.

Les eaux « digérées » dans une fosse à eaux grises peuvent, soit

[1]
Au cas où le puits d'infiltration n'atteint pas la nappe phréatique, la seule menace pour les eaux souterraines provient de la présence éventuelle d'eaux-vannes. Celles-ci, surtout après épuration, contiennent de grandes quantités de nitrates et/ou d'ions d'ammonium. Ces ions de petite taille traversent toutes les formations géologiques pour rejoindre les eaux souterraines. Les eaux grises, ne contenant presque pas d'azote, même après déversement dans un puits perdant, elles ne produisent pas de pollution.
[2]
Ici, il ne s'agit nullement d'une épuration par les plantes. Les eaux sortant d'une fosse à eaux grises contiennent en fait beaucoup moins de nitrates que l'eau de distribution utilisée par le ménage. En l'absence de lessives phosphatées, il n'y a pas de phosphore non plus. Les plantes n'ont rien à assimiler. Leur rhizosphère sert seulement de filtre mécanique pour retenir les micelles de salissure-détergent (et savons) et les micelles bactériennes pour clarifier l'eau. Les matières retenues sont alors prises en charge par des bactéries aérobies.

En été, les eaux grises peuvent aussi être valorisées pour l'irrigation des plantes du jardin. C'est même la solution la plus rationnelle et la plus respectueuse de l'environnement.

L'épuration par les plantes constitue une technique d'élimination de l'azote et du phosphore – comme l'épuration tertiaire classique. Ici aussi, il s'agit d'une technique de réparation. La récupération partielle de l'azote et du phosphore des déjections via le compostage des plantes qui épurent, se fait avec beaucoup de pertes et au moyen d'un cycle solaire supplémentaire. Le compostage direct des effluents d'une bonne toilette sèche ou celui de la matière végétale imprégnée d'eaux-vannes, est beaucoup plus efficace et simple [3].

Lire aussi le chapitre consacré au problème de l'épuration par les plantes.

[3]
Le compostage de la matière végétale cellulosique imprégnée d'eaux-vannes peut produire beaucoup d'énergie thermique de basse température utilisable pour le chauffage des serres et même des habitations. Tout cela n'est plus possible lorsque les eaux-vannes sont épurées par les plantes. De plus, nous ignorons comment les résidus de médicaments sont éliminés au cours d'une phyto-épuration. Il y a des chances qu'elles ne soient pas plus éliminées que pendant l'épuration classique.

Eutrophisation

L'eutrophisation est la multiplication excessive des algues dans l'eau d'une rivière, d'un lac ou de la mer. Elle est le résultat d'une teneur trop élevée de nitrates dans l'eau. La présence de petites quantités de phosphates est également nécessaire pour faire apparaître le phénomène. Même sans lessives phosphatées, l'eutrophisation apparaît dès le moment où l'on épure des eaux-vannes. En effet, nos déjections contiennent environ 1 kg de phosphore P par an par personne, qui représente 3 kg de phosphates après épuration (équivalent au rejet de 5,3 kg de phosphate trisodique utilisé dans les lessives). Voir le problème posé par le phosphore dans la documentation de l'eautarcie.

Une eau naturelle eutrophe peut encore être limpide. Dans des cas graves, l'eau devient verdâtre, sa surface peut se couvrir de lentilles d'eau. Dans tous les cas, les pierres au fond de l'eau se couvrent d'une couche de biofilm gluante et glissante. Des algues filamenteuses peuvent aussi s'y accrocher. En aval du déversement d'une station d'épuration, l'eau de la rivière présente toujours le phénomène d'eutrophisation. Les nitrates et les phosphates sont le résultat de la bio-oxydation pendant l'épuration de la charge polluante issue des WC.

L'effet de ce phénomène est la consommation (surtout la nuit) de l'oxygène dissous dans l'eau par les algues. On parle alors d'asphyxie du milieu aquatique concerné. Les poissons ont de plus en plus de mal à y survivre.

Pour leur croissance, les algues consomment les nitrates et les phosphates dissous. Ce phénomène contribue à l'autoépuration des cours d'eau. De ce fait, après une certaine distance en aval du déversement d'une station d'épuration, le phénomène d'eutrophisation peut s'atténuer, voire disparaître. Dans la pratique, la succession des stations au fil d'une rivière fait dépasser le pouvoir auto-épurant du cours d'eau. Une partie importante de nitrates et de phosphates d'origine métabolique (issue des déjections) finit par arriver dans la mer et y provoquer une croissance excessive des algues. Tant qu'on maintient le système de tout-à-l'égout, la suppression des lessives phosphatées n'aura que très peu d'effet sur l'eutrophisation.

L'invasion de nos plages maritimes par les algues

Il s'agit d'un phénomène préoccupant qui coûte cher à la collectivité. De toute évidence, la charge polluante rejetée avec les eaux épurées a dépassé la capacité d'autoépuration des rivières qui se déversent dans la mer. A ce niveau, les défenseurs de l'épuration et le monde agricole se montrent du doigt, les uns accusant les autres de polluer. Il y a beaucoup à parier que l'invasion de nos plages par les algues est plutôt imputable à l'épuration et non pas à l'agriculture. En effet, cette invasion n'est apparue qu'après la mise en place du programme pharaonique d'épuration, alors que « la pollution agricole » y était depuis près d'un siècle. La pollution agricole concerne surtout les nappes phréatiques. Les eaux de surface sont polluées par les stations d'épuration.

L'application à grande échelle des principes de SAINECO rendraient la pureté naturelle à toutes les rivières non polluées par l'industrie. Elle ferait aussi disparaître progressivement les algues sur nos plages.

Usage des toilettes sèches

On appelle toilette sèche, toute installation qui évacue les déjections humaines sans leurs rejets dans l'eau. Contrairement à la vision classique, toutes les toilettes sèches n'ont pas les mêmes impacts sur l'environnement. On peut classer les toilettes sèches suivant différents critères. Certains parlent de toilettes à compostage interne ou externe. On peut également les classer suivant leur principe de fonctionnement. Cette classification retient trois générations de toilettes sèches.

En tant que technique de prévention, les toilettes sèches font, en principe, partie de l'assainissement écologique. L'usage de ces toilettes poursuit trois objectifs :

  1. Prévenir la pollution des cours d'eau due aux rejets des eaux-vannes;
  2. Économiser l'eau par la suppression des chasses;
  3. Introduire la matière organique azotée des déjections dans les grands cycles naturels et dans le processus de formation des sols.

Ces objectifs sont atteints à des degrés divers par les toilettes sèches en usage. Le premier objectif est atteint par toutes les toilettes sans chasse d'eau. Le deuxième n'est atteint que partiellement, le troisième pas du tout, par les toilettes dites «scandinaves» fonctionnant par la séparation de l'urine et l'épandage de celui-ci sur le sol. En effet, l'obligation de dilution de l'urine avant son utilisation agricole annule partiellement les économies réalisées grâce à la suppression des chasses, tandis que l'épandage de l'urine stocké sur la terre s'apparente à celui de la valorisation agricole du lisier d'élevage. Il n'y a donc presque pas d'introduction de la matière organique dans le cycle naturel de l'azote. Pour ce faire, la totalité des déjections (urine + fèces) doit entrer dans un processus de formation d'humus. A l'état actuel de nos connaissances, seul l'application du principe de la TLB (toilette à litière biomaîtrisée) permet d'atteindre le troisième objectif aussi.

Lire aussi le chapitre consacré à notre vision des déjections.

SAINECO en ville

Imaginons le bassin versant d'une petite rivière, transformée en égout à ciel ouvert par les eaux usées de plusieurs quartiers résidentiels.

Un quartier résidentiel selon l'option classique

L'installation des égouts et la construction d'une station d'épuration représente ici un coût élevé pour un résultat pour le moins discutable. En dépit de l'épuration, l'eau de la rivière restera de qualité médiocre (eutrophisation). Une proportion importante de l'azote et une grande partie du phosphore restera dans les boues d'épuration. La «valorisation agricole» de ces boues alimentera généreusement les eaux de ruissellement et les eaux d'infiltration en nitrates. Le coût de l'entretien et de maintenance du système d'assainissement restera élevé et récurrents pour les années à venir.

Un quartier résidentiel selon l'option SAINECO

La valorisation intégrale de l'eau de pluie combinée avec des toilettes sèches, les fosses à vidanger pour eaux-vannes et le traitement sélectif sur place des eaux grises auraient un impact environnemental dépassant les prévisions les plus optimistes, pour un coût tout à fait dérisoire.

L'eau de la voirie serait tout simplement canalisée vers des caniveaux couverts de plaques de béton ajourées. Le non-placement des égouts étanches et la non-construction de la station dépuration couvrirait largement le coût du traitement sélectif des eaux et même le placement des citernes à eau de pluie. Le coût de maintenance et d'entretien de ce système d'assainissement est tout à fait négligeable [4] devant celui de l'option classique.

[4]
Comte tenu du fait qu'avec les déchets cellulosiques imprégnés d'eaux-vannes issues des fosses à vidanger pourraient servir de production d'énergie pour le chauffage des habitations, ainsi que la vente du de l'amendement agricole qui se forme pendant le fonctionnement des « chaudières à compost, les frais des vidanges pourraient facilement tendre vers zéro.

La rivière retrouverait rapidement sa pureté originelle avec la possibilité de pêche aux truites et aux saumons entre autres. Grâce à la capacité de rétention d'eau de l'humus, l'utilisation du compost des déjections dans les jardins réduirait les besoins en eau d'arrosage. Elle supprimerait l'usage des engrais chimiques et réduirait fortement les besoins en produits phytosanitaires, d'où une réduction de la pollution. L'utilisation intégrale de l'eau de pluie réduirait la consommation des détergents et le rejet des flacons d'eau minérale. Dans les régions sèches l'assainissement écologique est une nécessité immédiate et constitue le premier pas important pour sortir de la crise de l'eau. Il est instructif de lire à ce sujet un témoignage venant d'Andalousie (Espagne).

Contrairement aux idées reçues et habilement entretenues, le concept de SAINECO est parfaitement transposable dans les centres urbains.

Lire aussi le chapitre intitulé SAINECO en ville.

La gestion durable des sols

Il n'y a pas d'assainissement écologique, ni production alimentaire durable, sans intégrer dans ses préoccupations, la gestion durable du sol.

La pédogenèse

La pédogenèse est le processus de formation des sols. Elle se fait en deux étapes : le morcellement des roches (action organo-détritique), suivi d'une action des végétaux et aussi des bactéries. Il faut des siècles, voire des millénaires pour faire de la sorte quelques centimètres d'épaisseur de terre fertile pouvant entretenir des végétaux. Sans couverture végétale, le vent et l'eau peuvent rapidement emporter la terre pour former un désert de pierres.

L'importance de l'humus

A la base de toute vie terrestre se trouve l'humus, dont la formation fait partie intégrante de la pédogenèse. Il s'agit d'une substance organique d'une grande complexité, de couleur brune, toujours présente dans les terres arables. Cette matière est souvent appelée «l'or brun de la terre», car elle est à la base de la fertilité naturelle du sol. Dans les faits, le phénomène de désertification n'est rien d'autre que la disparition de l'humus du sol.

L'humus se forme à partir des matières organiques, grâce à un long processus de transformation qui fait intervenir des bactéries, des champignons microscopiques et aussi des verres de terre. C'est un ensemble de macromolécules réticulées apparentées à des substances protéiques (contenant des acides aminés). Ces macromolécules sont chimisorbées sur les particules du sol. Les argiles (alumino-silicates) ont une grande affinité vis-à-vis de l'humus, mais l'humus peut aussi s'adsorber sur de la silice (sable siliceux pur), ou sur les sulfates (gypse ou plâtre). Sur les carbonates, comme le calcaire, l'adsorption est moins stable. L'humus adsorbé sur un substrat fait d'alumino-silicates constitue les complexes dits argilo-humiques, particulièrement stables et importants dans le maintien de la fertilité naturelle des sols.

L'humus se forme naturellement surtout dans les forêts, au départ des feuilles, branches et végétaux morts, ainsi que des déjections et des dépouilles des animaux sauvages. On peut étudier ce processus en détail pour les sols des forêts de feuillus (Lire à ce sujet, entre autres le livre de P. Pesson et coll., Actualités d'écologie forestière, sol, flore, faune, Éditions Gauthier-Villars, 1980).

En présence de suffisamment d'humus, la terre sablonneuse acquiert une certaine consistance et devient plus compacte, résistant mieux à l'érosion éolienne et aquatique. Lorsqu'elles contiennent suffisamment d'humus, les terres argileuses, naturellement compactes, deviennent friables et plus faciles à cultiver. Dans tous les cas, l'humus fonctionne dans le sol comme une éponge énorme. Une terre contenant beaucoup d'humus a une grande capacité de rétention d'eau : un gramme d'humus est capable de retenir et fixer de 10 à 50 fois sa masse en eau. L'eau infiltrée dans un sol humifère y est retenue et est soit rendue aux plantes au fur et à mesure de leurs besoins, soit relâchée lentement vers la nappe phréatique pour alimenter les puits et les sources. Les cultures demandent alors moins d'eau d'irrigation. Le ruissellement et, de ce fait, l'érosion diminuent.
Lecture conseillée : André BIRRE, « L'humus, richesse et santé de la terre » Éd. : La Maison Rustique (1979)

Les composantes végétales et animales de l'humus

Dans la nature, la quantité de la biomasse d'origine végétale - riche en carbone - est prédominante devant celle de la biomasse d'origine animale (dépouilles et déjections des animaux) - riche en azote [5]. Les deux types de biomasse forment ensemble l'humus, au terme d'un processus pouvant prendre plusieurs années.

[5]
C'est d'ailleurs la proportion qu'il faut réaliser lors de la constitution d'un tas de compost. Dans un tel mélange le rapport carbone/azote ou C/N est de l'ordre de 60.

L'incorporation directe de la matière organique brute dans le sol ne donne que très peu d'humus. La matière végétale étant trop pauvre en azote, elle aura tendance à mobiliser les réserves humiques du sol et provoque un phénomène qu'on désigne par le nom de faim d'azote. Un phénomène semblable se passe lors de l'incorporation de la biomasse animale (fumier frais, lisier) qui apporte trop d'azote et crée le phénomène de « faim de carbone » qui finit par « brûler » l'humus déjà stabilisé dans le sol. Pendant ce processus, l'azote ammoniacal et nitrique augmente les rendements au détriment de la fertilité naturelle du sol. L'azote non assimilé par les plantes rejoint comme pollution les nappes phréatiques. C'est une des raisons pour laquelle, même l'agriculture biologique mal conduite peut devenir polluante. Une agriculture réellement durable ne peut donc pas se passer de compostage en tas ou en surface.

Pour la formation de l'humus, il faut la présence simultanée de la cellulose, la lignine végétale et les substances protéiques animales (déjections) + le carbamide (l'urée) contenu dans l'urine. Attention, ces trois (ou quatre) composantes doivent être présentes, dans des conditions aérobies (donc en présence d'air), dès le départ du processus. Le stockage de l'urine fait perdre le carbamide [6] par hydrolyse enzymatique à l'aide de l'uréase, toujours présent dans les urines. Le squelette carboné de la cellulose fixe les molécules de carbamide et, de ce fait, empêche la réaction d'hydrolyse produisant de l'ammoniac (malodorant) et du dioxyde de carbone. Le carbamide fixé sur la cellulose, forme, après plusieurs étapes réactionnelles, des liaisons peptidiques, donc des molécules géantes polymériques réticulées dans l'espace et apparentées aux acides aminés. C'est le premier précurseur de l'humus qu'on appelle communément acides humiques. Pendant le stockage de l'urine ou du lisier, ce processus n'a pas lieu : le carbamide se décompose spontanément en ammoniac et en dioxyde de carbone. On ouvre ainsi la voie à la pollution des eaux.

[6]
Le carbamide (H2N)2CO est la composante majeure azoté des déjections. L’hydrolyse enzymatique d’une molécule de carbamide produit une molécule de CO2 et deux d'ammoniac HN3. Sa gestion est donc la clef de la formation artificielle de l'humus. Les toilettes à séparation de l'urine court-circuitent ce processus et produisent de la pollution par les nitrates.

Le compostage

Le compostage mené correctement est la reconstitution artificielle du processus de formation naturelle de l'humus du sol. C'est la raison pour laquelle, dans un compost équilibré, il faut la présence conjointe de la biomasse végétale et animale.

Le jardinier fait son humus en entassant tous les déchets de jardin (feuilles mortes, mauvaises herbes arrachées, la tonte du gazon, la taille des arbres, etc.) et aussi celles de la cuisine (restes des repas, épluchures, aliments gâtés, etc.). Pour faire un compost équilibré, à côté de ces déchets d'origine végétale, il est bon d'y introduire du fumier animal et/ou humain.

Le rapport carbone/azote ou C/N d'un compost équilibré avant la maturation est de l'ordre de 60 (donc plus riche en matière cellulosique végétale qu'en matière azoté animale). Au terme du compostage (environ un an) le rapport carbone/azote est de l'ordre de 14. La matière brune obtenue n'est pas encore de l'humus. Le processus de formation s'achève dans le sol en interaction avec la faune naturelle du sol (bactéries et autres) et avec ses particules minérales. On appelle humus stable la matière brune fixée sur les particules du sol avec une véritable liaison chimique. On parle alors de complexes argilo-humiques. C'est ce qui donne la coloration brune aux sols riches qui ont une capacité de rétention d'eau élevée. Avec les complexes argilo-humiques (ou silico-humiques) les terres lourdes argileuses deviennent friables alors que le sable devient «collant». Surtout dans les régions où le sol est silico-calcaireux, afin de favoriser la formation des complexes argilo-humiques pendant le compostage, on ajoute au compost un peu de poudre d'argile finement divisée.

Lire aussi le chapitre consacré au compostage des déjections humaines.

La dégradation de l'humus

L'humus contenu dans le sol disparaît spontanément par un processus de «combustion» biologique ou d'oxydation lente, mais naturel. Dans une terre agricole bien entretenue, la disparition naturelle de l'humus est contrebalancée par un apport régulier d'amendements organiques.

L'humus du sol se décompose spontanément, tout en nourrissant les plantes. Sa vitesse de décomposition augmente avec la température. Elle augmente exponentiellement avec la racine carrée de la force ionique de l'eau interstitielle (eau qui se trouve entre les particules du sol). La force ionique est proportionnelle à la concentration des sels solubles (engrais solubles, chaux, cendre de bois, certains amendements minéraux, etc. qui produisent des ions par décomposition électrolytique). Plus il y a de ces électrolytes (qu'on appelle aussi de « sels dissous »), plus rapide est la décomposition de l'humus, et plus rapide est l'apport fertilisant pour les plantes. C'est ce qui explique les rendements élevés suite au chaulage, à l'ajout de cendre de bois, de digestat de biométhane, d'urine, de lisier, de fumier frais, etc., qui augmentent tous la force ionique. L'utilisation des engrais de synthèse (engrais dits «chimiques») accélère ainsi le processus naturel de disparition de l'humus.

En agriculture industrielle, le premier effet de ces pratiques est l'augmentation spectaculaire des rendements agricoles. Cependant, les rendements élevés sont obtenus au détriment des réserves humiques du sol. Les productions végétales ne peuvent être maintenues que par l'usage massif d'engrais chimiques ou de lisier, de nature chimique inorganique. En l'absence d'humus ou dans un sol qui en contient peu, sans adjonction de ces fertilisants, les rendements s'effondrent et on entre dans une spirale infernale de fertilisation par des engrais de synthèse.

Les plantes « gavées » de nutriments inorganiques se gorgent d'eau, d'où une augmentation uniquement pondérale des rendements. A l'instar des oies gavés, les plantes deviennent d'abord fragiles, puis elles tombent malades. Les besoins en produits phytosanitaires (dits « pesticides ») est une conséquence inévitable et logique de l'usage des amendements inorganiques. On arrive ainsi à produire des aliments qui peuvent même nuire à la santé; sans parler de leur valeur nutritive (dans le sens du maintien de la santé du consommateur) diminuée.

La production « d'énergie verte »: une activité suicidaire

Une autre conséquence de cette agriculture insoutenable est la consommation excessive d'énergie fossile. Les terres sans humus demandent beaucoup plus d'énergie et de puissance (tracteurs) pour les travaux du sol. La fabrication des engrais chimiques et d'autres produits consomment également de l'énergie. Par exemple, pour fabriquer 1 kg d'azote sous forme d'engrais chimique, on brûle 2,5 kg de pétrole. Actuellement, l'agriculture dite « moderne » consomme plus d'énergie qu'elle n'en produit.

L'humus disparaissant du sol, les phénomènes d'érosion s'accentuent, tandis que les sols argileux deviennent de plus en plus compacts, faisant des grosses fissures au séchage et nécessitant des machines de plus en plus puissantes qui, à leur tour, tassent encore d'avantage le sol. Sans humus, les précipitations ont tendance à ruisseler, provoquant des inondations. La terre finit par s'en aller par érosion. Le sol sablonneux devient sable libre que le vent et l'eau emportent. En cas de sécheresse, faute d'eau stockée dans l'humus, les rivières ont tendance à l'étiage. Leur débit change fortement en fonction de la pluviosité. Les sources se tarissent, les périodes d'inondations et de grande sécheresse s'alternent chaque année. La végétation se raréfie, les rendements agricoles s'effondrent. En l'absence d'humus, le sol dépourvu de couverture végétale devient de plus en plus clair (son albédo augmente) provoquant des courants d'air ascendants qui chassent les nuages plus loin. Les sols sont emportés par le vent et les eaux. Les pluies deviennent plus rares. Bref, c'est le début du processus de désertification.

Tout ceci est le résultat final de l'agriculture industrielle qui vit actuellement sur les dernières réserves humiques des terres agricoles. L'agriculture intensive (qualifiée de "moderne") détruit la fertilité naturelle des sols, compromettant la production alimentaire des générations futures.

Heureusement, ce processus peut encore être inversé, mais il en est grand temps. Pour cela, de part le monde, il faut mobiliser toute la biomasse végétale et animale (humaine) disponible pour augmenter la teneur en humus des terres. Il faudra environ 50 ans de gestion intense pour sauver nos terres de la disparition.

On comprend à présent pourquoi la « valorisation énergétique » de la biomasse par combustion est non seulement un gâchis, mais une activité suicidaire pour l'humanité et une atteinte grave à la biosphère. Dans notre monde de gabegie énergétique la valeur de « l'énergie verte » produite est bien inférieure à la valeur biologique de la biomasse détruite par combustion, et soustraite à la pédogenèse.

Brûler donc de pellets de bois dans des chaudières, fabriquer du biogaz et autres biocarburants est une activité irrationnelle. La mobilisation des terres agricoles pour les cultures énergétiques contre la production alimentaire n'est qu'un aspect mineur du problème. Avec la combustion de la biomasse, on prépare intensivement les déserts de demain et la famine généralisée.

Pour écouter l'avis d'un ingénieur agricole sur le sujet, cliquez ci-dessous.

Alerte à Babylone, le film de Jean Druon

envoyé par tinou1225.

Le rétablissement de la teneur en humus de la terre d'une région désertique est susceptible de rétablir le régime hydrique. Les sources se remettent à couler et le débit des rivières devient plus régulier. Le sol se recouvre d'une végétation qui modifie progressivement le climat, en augmentant la pluviosité.

A la base des inondations de plus en plus fréquentes sur notre planète, se trouve l'appauvrissement des terres en humus, que ce soit à cause de déforestations excessives, ou de pratiques agricoles néfastes.

Gestion durable de la biomasse

Pour retourner ce processus, il est indispensable de mettre en place un programme mondial de gestion durable de la biomasse.

Tout d'abord, il faut commencer par reconnaître que les déjections animales et humaines ne sont pas des déchets à éliminer sous prétexte d’épuration. Elles font partie des écosystèmes qui produisent notre alimentation. Notre alimentation vient de la terre, et pour boucler les cycles naturels, nos déjections doivent obligatoirement y retourner sous forme d'humus stabilisé.

L'obstacle principal devant l'engagement d'une politique de gestion globale de la biomasse est l'obstination irrationnelle pour le maintien du système du tout-à-l'égout. L'autre obstacle est le maintien de l'agriculture mondiale dans le système de spéculation financière.

Lire aussi le chapitre consacré à la valorisation énergétique de la biomasse.

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